L’Art

L’esthétique est une réflexion sur les critères d’appréciation de l’oeuvre d’art. Parmi les notions du programme, l’Art constitue un problème en soi, qui justifie un traitement à part.

L’Art peut apparaître comme la moins nécessaire de toutes les activités humaines, eu égard aux impératifs de l’adaptation au monde naturel et social, et en même temps comme la plus humaine, en tant qu’il manifeste  la liberté de l’esprit qui distingue l’homme de l’animal. Tandis que la finalité de la technique, aussi loin qu’on remonte dans l’histoire de la civilisation, est toujours limpide, les oeuvres d’Art se distinguent précisément par leur caractère énigmatique, l’absence de finalité claire et univoque. L’Art n’existe en effet que parce qu’il y a en l’homme un sens esthétique qui conduit à reconnaître à certaines créations de la nature ou de l’homme une valeur indépendante de l’utilité. Définir cette valeur est toutefois immédiatement un problème. S’il s’agit du « Beau » (de la beauté, il faut tenter de préciser ce que représente et signifie pour nous cette mystérieuse qualité.

L’art, au sens général et premier du terme, est synonyme de technique et désigne l’activité fabricatrice de l’homme. Si nous distinguons l’Art et la technique, l’artiste de l’artisan, c’est afin de désigner ce qu’ont en propre les « beaux-arts » par rapport aux « arts mécaniques » : la formule suggère que l’Art, s’il n’a pas pour finalité l’utile, la satisfaction d’un besoin, doit être associé à l’expérience esthétique, l’expérience du beau.  L’Art aurait pour finalité de susciter des émotions esthétiques, de créer des oeuvres belles.  Au regard de l’histoire de l’Art, il est toutefois possible de discuter cette idée. Dans l’histoire de l’humanité, l’Art a longtemps eu une signification religieuse : les oeuvres avaient pour fonction d’exprimer le sacré, le divin. A l’époque contemporaine, deux fonctions se distinguent, s’opposent ou se complètent : le divertissement, dans ce qu’on appelle « la culture de masse », et l’originalité (la créativité), valorisée dans ce qu’on appelle « l’Art contemporain ».

La réflexion sur l’Art se donne ainsi pour but d’examiner et d’évaluer la diversité des critères du jugement esthétique (de l’appréciation de la valeur des oeuvres d’Art) : le divertissement, l’originalité, la beauté, l’expression des sentiments, de la moralité, de la vérité ou du divin.

Questions :

A quoi sert l’Art ? Pourquoi des artistes ? (Quelle était la raison d’être des oeuvres peintes sur les parois des grottes préhistoriques ? Pourquoi y-t-il des artistes dans les sociétés humaines ?) Qu’est-ce qui fait le sens et la valeur d’une oeuvre d’art ?

Qu’est-ce que le beau ? L’art est-il la représentation d’une belle chose ou la belle représentation d’une chose ? Une oeuvre d’art est-elle nécessairement belle ? L’art a-t-il toujours été au service de la beauté ? L’est-il encore ? Le beau se distingue-t-il vraiment de l’agréable ou bien appelle-t-on « beau », avec emphase, ce qui nous plaît, ce qui nous est agréable ? L’art n’a-t-il pas simplement pour fonction de plaire, de divertir, de séduire, d’agrémenter l’existence ? Ou bien, à l’inverse, faut-il voir dans l’art une expression sérieuse et profonde de la vie de l’esprit, une expression qui peut être austère, voire abstraite ? L’artiste n’est-il pas d’abord un créateur ? L’oeuvre d’art, n’est-ce pas l’oeuvre originale, l’oeuvre à nulle autre pareille, dont la copie parfaite n’est plus une oeuvre d’art mais une vulgaire imitation ? Est-ce « la création artistique » qu’il faut valoriser dans l’art, ou bien cette valorisation de l’originalité pour l’originalité n’est-elle que le propre de l’art moderne ?  Cette valorisation de la création et de la figure de l’artiste n’est-elle pas associée au culte moderne de « l’art pour l’art », lequel n’a pas toujours existé?

A voir, pour illustrer le problème, la pièce de théatre « Art », dont le thème est la querelle de l’Art contemporain : « Art », de Yasmina Reza.